Fouilles préventives à Étalondes :
La "Plaine du Chemin Saint-Martin" :
deux établissements routiers antiques
en bordure de la voie littorale Dieppe-Eu
En automne 2009, des sondages sur plus de 5.000 m2 sont réalisés par l'INRAP (resp. F. Kliesch) à Étalondes, au lieu-dit "La Plaine du Chemin Saint-Martin", dans le cadre d'un projet d'implantation de ZAC. Ces travaux révèlent la “présence d’une partie d’un établissement rural antique important” (Kliesch 2009). Considérant ces résultats et l’état de conservation satisfaisant des vestiges, les services de l’Etat décident la réalisation d’une fouille sur l’ensemble du projet, soit environ 4 ha. Face à cet impondérable, l’aménageur ne donne pas suite et il faut attendre la fin de l’année 2012, après trois ans de déshérence, pour que le projet soit relancé par l'Immobilière Européenne des Mousquetaires qui souhaite établir une enseigne Bricomarché. La fouille est alors confiée au SMAVE.
La fouille de la “Plaine du Chemin Saint-Martin” s’est déroulée en deux tranches (de mai à mi-juillet, puis en novembre-décembre 2013) ; elle a mobilisé une équipe de 9 personnes en moyenne. La surface totale exploitée est de 32.700 m2 environ.
A l’exception de quelques constructions en silex, les vestiges mis au jour sont des "structures en creux" : fosses, fossés, silos, trous de poteaux, etc. L'hypothèse initiale d'un établissement de type villa est invalidé : le plan général montre un ensemble d'enclos et de bâtiments gallo-romains organisés en bordure d'une voie. L’évolution de l'occupation antique peut être résumée en trois phases successives :
- Les aménagements les plus anciens sont quelques fossés délimitant des parcelles agricoles et attribuables aux dernières décennies avant notre ère.
- Dans le courant du Ier s. de notre ère, le paysage est considérablement transformé par la construction d’une large voie bordée de fossés. Parallèle à la route départementale actuelle, celle-ci constitue un axe directeur autour duquel vient s’organiser l’occupation. Au nord, deux séries d’enclos délimités par des fossés correspondent à de petites exploitations agricoles au sein desquelles on peut distinguer aires de travail et espace d'habitation.
- La chaussée est reconstruite et empierrée à la fin du Ier s. Son tracé est légèrement infléchi et décalé vers le sud. La voie et l’occupation de ses abords sont étroitement liés, aussi la réfection de la chaussée s’accompagne-t-elle d’une réorganisation des enclos qui la bordent.
Cette évolution s’inscrit dans une forme de continuité par rapport à l’état antérieur : les enclos reprennent en partie l’organisation des établissements précédents, la fonction d’habitat perdure et de nombreux indices témoignent de la persistance de l’activité agro-pastorale, qu’il s’agisse du mobilier (outillage, clarines) ou des nombreuses structures de stockage de denrées (silos à grains et resserres).
Huit sépultures à incinération ont été découvertes, associées à cette dernière phase d'occupation et plus particulièrement au début du IIIe s.
Aucun indice ne permet d’attester une occupation du site au-delà de la fin du IIIe s. Cet abandon s’inscrit dans un cadre plus général qui touche tout le nord de la Seine-Maritime et tout particulièrement la frange côtière.
Laurent Cholet & Guillaume Blondel
SMAVE
Éléments de bibliographie
KLIESCH (F.) (dir.), Etalondes, Seine-Maritime, "La Plaine du chemin Saint-Martin" RD 925. Un établissement rural gallo-romain, rapport de diagnostic, INRAP Grand-Ouest, 2010.
MANTEL (É.), DEVILLERS (S.), DUBOIS (S.), L’occupation du nord de la Seine-Maritime, in ROGERET (I.), Carte Archéologique de la Gaule : La Seine-Maritime, MSH, Paris, 1998, p. 75-78.
Avec le soutien de Bricomarché, de la mairie d'Étalondes et de l’entreprise A.R.H.TP, le SMAVE a organisé une exposition consacrée aux fouilles de la “Plaine du Chemin Saint-Martin” dans les locaux mêmes du Bricomarché à l’origine de l’opération.
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